27 février 2018

Cambodge


      Nous sommes au Cambodge depuis quelques jours, un très court séjour, principalement pour visiter Angkor, LE site phare du pays et même des pays voisins. Le voyage depuis Pakse, au Laos s’est déroulé sans problème, si ce n’est les quelques heures de retard habituelles, et les quelques dollars extorqués par les douaniers au passage de la frontière. Cette fois, il nous a fallu payer pour avoir le tampon de sortie du Laos, et bien sûr payer aussi pour entrer au Cambodge. Deux dollars pour avoir le tampon certifiant que l’on n’est pas contagieux ! C’est à la fois agaçant, risible, et peu onéreux. L’an dernier, les douaniers mexicains nous avaient extorqué quarante dollars par personne pour sortir du pays. Taxes bien sûr illégales, mais comment discuter, ergoter quand on est prisonnier des horaires d’un bus qui ne peut attendre indéfiniment qu’un passager résolve ses problèmes de douane. Les douaniers le savent bien, d’ailleurs dans ces pays c’est une des professions les plus prisées : Pas de risque et corruption organisée, tout le monde veut être douanier !

Siem Reap by night

Notre base, Siem Reap est LA ville de départ pour visiter Angkor. C’est une ville de touristes, peuplée de touristes et des gens qui en vivent. Salon de massage, hôtels, restaurants, commerces de souvenirs se succèdent dans les rues. Les clubs, bars de nuit, karaoké fonctionnent à outrance, jour et nuit et diffusent leur musique dans les rues par des sonos tellement saturées que les enceintes vibrent. Quelques rues du centre, le soir, deviennent piétonnes et s’illuminent de guirlandes, annonces publicitaires clignotantes, de lampes qui flashent, de panneaux lumineux qui vantent les mérites d’un établissement ou d’un produit. Un mélange de Las Vegas et de Times Square à la sauce cambodgienne, et là, défilent des flots cosmopolites en quête de je ne sais quoi ; un verre, un peu de dépaysement,  un moment de délassement ? La plupart ont déjà subi la foule des sites, ils ne peuvent plus s’en passer ! Les tuk-tuk, s’empressent, sollicitent, quémandent une course, près du marché les vendeurs font de même. Toute une armée de petits commerces est en quête de l’aubaine de quelques dollars.
Car ici, la monnaie nationale a disparu. Tout se traite en dollars, ce qui est officiel comme les entrées du très beau musée archéologique d’Angkor, très beau et très cher, le pass d’entrée des sites, les visas aux frontières, mais aussi les repas, les boissons, tout ! Le dollar est l’unité de base, en dessous on rend la monnaie en riels qui ne servent à rien, si ce n’est à partir en pourboire. Autant dire que le pays est bien plus cher que ses voisins et pourtant… Je me pose des questions sur le niveau de vie des habitants, car à côté des luxueux 4x4 qui sillonnent la ville existe une grande pauvreté. C’est aussi dans ce pays que l’on a vu le plus de mendicité…
En marge des temples d’Angkor, nous avons visité un village flottant sur le grand lac Tonle Sap. Nous avons fait une longue route en tuk tuk pour atteindre un village encore épargné par la fièvre du tourisme, un vrai village, authentique… Enfin, presque ! Il est vrai que les touristes y sont encore rares, et que la rue du village ne leur propose aucune boutique spécialisée dans l’attrape touriste !
Mais le village s’est constitué en association et prélève une belle taxe d’entrée, en dollars évidemment, qui donne droit, il est vrai, à une promenade en bateau.
Les gens vivent de la pêche, et, en saison sèche des cultures, haricots, riz, maïs, qu’ils établissent sur les berges asséchées du lac, car celui-ci recule de plusieurs kilomètres avant de se gonfler à nouveau, à la saison des pluies et de regagner des mètres de profondeur. Les maisons perchées tout en haut d’une forêt de minces poteaux en témoignent. En hautes eaux elles ont des terrasses « les pieds dans l’eau », alors que maintenant ce seraient plutôt des départs de saut à l’élastique ! En tout cas, tout ce petit monde vit pauvrement, très pauvrement. Ici, pas de belles voitures, quelques motos, fourgons de livraison qui bringuebalent sur la piste chaotique.
Les poissons sèchent sur des claies à même le sol et l’odeur nous a rappelé les berges du Niger à Mopti en à peine plus propre. Le bateau qui nous emmène rejoindre le lac fait un bruit d’enfer et suit un long chenal peu profond qui sinue entre les terres cultivées.
Ici, à la différence du Vietnam où la terre se divise en petits lopins, de grandes étendues sont cultivées d’un seul tenant et l’agriculture y est plus mécanisée. Pour arroser les haricots des remorques équipées de long bras haubanés, sont tirées par leurs fameux motoculteurs à tout faire. Elles donnent de loin l’impression de grands insectes gracieux. Le lac se dévoile enfin, immense et libre. Quelques maisons flottantes rôdent encore à quelques encablures, sans doute vouées à la pêche, on ne sait pas…

Une visite très intéressante et instructive, loin de l’industrie touristique qui nous a donné une autre vision du pays.
Un pays en train de se reconstruire après une longue guerre civile et une occupation qui, si elle a ramené la paix, a quand même été durement subie. Les vietnamiens ne sont plus très bien perçus, mais ils forment maintenant une minorité installée importante et je soupçonne que leur côté industrieux les a amenés à prendre une bonne part de l’économie renaissante. Le chauffeur de tuk-tuk qui nous a accompagné lors de la visite nous signalait : « Ici, vietnamiens, ici, vietnamiens ! » Leurs maisons n’étaient pourtant ni plus belles, ni mieux loties que les autres et ils avaient l’air de vivre dans le même dénuement…

On quitte le pays aujourd’hui, lundi, après une dernière visite de temple. Un petit temple merveilleusement ciselé un peu à l’écart du circuit général, à une trentaine de kilomètres de la ville. Une pure beauté, de grès rose finement sculpté…

Conscients de n’avoir pas visité le Cambodge, mais seulement un lieu tellement emblématique qu’il fausse la perception et la vision du pays nous gardons de cette escapade une impression contrastée, impressionnés par la beauté de ce que nous avons vu,
gênés par l’exploitation intensive qui en est faite, et choqués devant l’insolence d’une toute nouvelle richesse opposée à une si grande pauvreté générale. Cela heurte toujours nos convictions…

On quitte le pays, on a même quitté le pays au moment où l’on publie ce blog, d’un petit coup d’aile magique qui nous a posé délicatement bien plus au nord, à Luang Prabang, au Laos.



C’est une bien belle petite ville, on vous en parlera plus tard…



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