Conduire au Mexique…
J’ai toujours aimé conduire, dans
tous les pays du monde, beaucoup moins maintenant chez nous. En France, pour se
montrer parfait conducteur il faudrait être une machine, un automate capable de
respecter les multiples consignes, avertissements, signaux, sans jamais tenir
compte des contingences humaines, la faim , la soif, le petit qui pleure, le
retard et ses implications, l’état d’énervement, de fatigue…
Au Mexique l’humanité reprend ses
droits au volant, tous ses droits ! La conduite y est question de perception
individuelle, de libre interprétation, de bon sens collectif. Chacun s’y
exprime selon son tempérament et… son véhicule. Bien sûr il existe des règles,
une signalisation, une codification, mais elles se diluent dans une ambiance
générale de pagaille plutôt bon enfant où chacun tente d’aller là où il veut,
comme il veut, quand il veut. C’est une conduite fantaisiste, comme aurait dit
ma belle-mère !
Quelques grandes
règles sont cependant admises par la majorité : Le respect des feux
rouges, par exemple, est assez unanime, même si on attend qu’il soit bien
rouge ! C’est là aussi une question de bon sens, les feux sont là pour
régler une circulation intense, passer au trop rouge c’est s’exposer au
démarrage en force d’une horde des premiers véhicules dans l’autre sens, qui
s’élancent au moindre frémissement de vert,
poussés par un frénétique concert de klaxons. Cela me fait un peu penser à la chasse à
courre, avec le gibier traqué, la meute de chiens aboyant et les trompes qui
pourchassent…
Donc une question de bon sens, de
feeling, on sent ou on ne sent pas, on
passe ou on ne passe pas. D’ailleurs en ville, les croisements de rues, souvent à angle droit, la plupart
des villes sont construites sur un plan quadrillé, se passent au « premier
arrivé, puis un, un ! » , il y a un panneau qui dit à peu près ça! C’est à vous de décider si vous êtes le
premier ou pas, mais il ne faut pas hésiter ! En général, si le concurrent
est un gros 4x4 rutilant, ou un bus, ce sont eux les premiers. Ils ont la
force, l’arrogance, le pouvoir pour eux... On s’efface, on se fait petit. Si
c’est une moto, un vieux pick-up déglingué, un tas de ferraille sur roues, il
est plus facile de s’imposer. Ainsi va la vie !
En dehors des villes, c’est plus
simple, les routes sont larges, droites sur un nombre impressionnant de
kilomètres et la circulation y est plus que fluide. Une habitude locale est de
transformer ces deux voies en trois, voire quatre voies, en utilisant les
bandes d’arrêt d’urgence. Ainsi les véhicules lents circulent à cheval sur la
bande d’arrêt ce qui permet aux plus rapides de doubler sans attendre qu’il n’y
ait plus rien en face. Pratique, ce système était aussi utilisé en Grèce,
avant, avant que l’Europe ne s’en mêle ! Il permet aussi de s’affranchir complètement
des interdictions de doubler, des lignes blanches, doubles ou simples, qui ne
servent plus à rien puisqu’on les franchit à peine ! Quand on double
ainsi, on prend la peine de signaler à celui d’en face par un petit appel de
phares qu’il ferait bien de se ranger un peu pour faciliter la manœuvre, c’est
la moindre des choses… Évidemment si la bande d’arrêt d’urgence est déjà
occupée, par un triporteur, un véhicule en panne, on signale par les
clignotants ou les phares, qu’il ne faut pas doubler et tout se passe
bien ! Les limitations de vitesse indiquées sont elles aussi tellement
fantaisistes, que leur ignorance est la règle générale. En fait chacun roule
selon son véhicule, à la vitesse qu’il veut ! Voilà, c'est dit, j’adore conduire
dans ce genre de pays, on y retrouve une sensation de liberté depuis longtemps
perdue chez nous.
Tout n’est cependant pas parfait,
car il y a les « topes » mais je vous en reparlerai plus tard, et une
signalisation tellement fantaisiste, elle aussi, erratique ,
illogique, qu’il est impossible pour
nous de nous y retrouver. Les directions ne sont que rarement indiquées ou
alors qu’au tout dernier moment, quand il faut tourner, ou alors c’est une
direction générale, 400 km plus loin… Les réseaux routiers se sont superposés,
comme les pyramides mayas et toltèques, on a pris des morceaux de routes
anciennes pour en construire des nouvelles avec plus de voies, la cartographie
et la signalétique n’ont pas suivies… Quand on sort des réseaux de grandes
routes, là, il n’y a plus rien, une pancarte de ci, de là, vous indique
vaguement une direction à suivre, direction que vous perdez dans le premier
village traversé… Heureusement Waze est là, qui nous aide. Mais même Waze s’y
perd parfois ! On s’en sort en prenant son temps, et le rôle du copilote
s’en retrouve grandi ! Ce qui n’est pas forcément du goût de Françoise,
copilote en chef, qui s’acharne et s’arrache les yeux, à s’en faire chauffer
les lentilles, à lire des cartes
insuffisamment précises ! Elle s’était habituée à se dispenser de cette
tâche et de cette lourde responsabilité…
Voilà, moi, j’aime bien conduire
dans ces conditions…